Circuits courts : des déceptions mais pas de déclin général
Au début du mois de mars, le RMT Alimentation Locale a diffusé une grande enquête à destination des acteurs des circuits courts pour éclairer les remontées de situations apparemment difficiles. Près de 800 réponses ont été recueillies. L'équipe a partagé les premières conclusion de ce travail dans un communiqué de presse.
Les difficultés vécues par certains producteurs en vente directe ou points de vente en circuits courts, ont souvent été généralisées comme des indices du déclin de ces modes de vente, comme un phénomène de mode arrivant à son terme. Pourtant, dans le même temps, nombre de magasins, notamment les supermarchés, mettent de plus en plus en avant leur engagement pour une origine locale des produits.
Le Réseau Mixte Technologique Alimentation Locale* a voulu éclairer le débat en recueillant des informations auprès des acteurs directement concernés. Une enquête en ligne a été lancée*, avec 5 questionnaires différents afin de croiser les données : vers les producteurs, les consommateurs, les accompagnateurs de circuits courts, les professionnels de l'alimentation et enfin les points de vente en circuits courts. Plus de 800 réponses ont été recueillies et traitées, illustrant l’ensemble des modes de vente en circuits courts (vente à la ferme, magasins de producteurs, marchés, AMAP...).
L'analyse des résultats révèle une réalité plus nuancée avec, par rapport à 2019, autant de hausses des ventes que de baisses.
Elle montre que les évolutions vécues par les uns et les autres résultent de causes multiples et non d’une cause unique, et que la crise de la Covid-19 continue à redistribuer les cartes, dans les territoires comme dans le secteur de la distribution alimentaire. Il n'y a pas de déclin général des circuits courts, mais suivant les conditions locales des grandes difficultés sont mises à jour, notamment pour celles et ceux qui ont réalisé des investissement à la faveur d'une clientèle grandissante.
L’intérêt pour les circuits courts reste important mais cela n’empêche pas certains producteurs ou magasins d’avoir des difficultés économiques.
Il s'agit souvent de professionnels qui ont investi par péché d'optimisme et qui pâtissent aujourd'hui du fait que la forte demande lors du premier confinement n’ait pas perduré. Les conditions locales sont une donnée clé pour comprendre les évolutions ; la crise a suscité de nouvelles concurrences, entre les circuits courts et avec des circuits longs valorisant des produits présentés comme locaux.
Le RMT Alimentation locale s’appuie désormais sur ces résultats pour aider les acteurs des circuits courts à conforter leurs situations ou bien trouver des solutions. La démarche est à la fois de faciliter les échanges d’expériences mais aussi le dialogue avec les collectivités, dans le cadre des Projets Alimentaires Territoriaux (PAT) en particulier.
Les six grands résultats issus de l'enquête :
1. Il n’y a pas de baisse généralisée des ventes en circuits courts, par rapport à la situation d’avant-crise.
2. Les baisses de vente ne concernent pas certains produits en particulier. Ce sont davantage les conditions locales qui permettent de comprendre les variations.
3. Les baisses de vente ne relèvent pas d’une cause unique.
4. Les consommateurs ont bien modifié leurs achats en circuits courts depuis le début de la crise. Ceux qui consommaient déjà dans ces circuits avant la crise ont souvent augmenté leurs dépenses, d’autres, nouveaux venus, ne sont pas forcément restés, ce qui contribue à expliquer certaines baisses de vente. De plus, localement, des consommateurs ont pu changer de circuit court.
5. Il n'y a pas de contradiction entre les difficultés vécues par certains producteurs ou magasins et la demande persistante en produits locaux. De nouveaux circuits courts sont nés pendant la crise et les produits présentés comme locaux - pas forcément issus d’un circuit court - ont progressé dans les rayons des supermarchés.
6. Les difficultés sont souvent liées à des anticipations trop optimistes, en regard de ventes en hausse lors de la crise.
*Le Réseau Mixte Technologique (RMT) Alimentation locale s’attache à comprendre les dynamiques de l’alimentation locale et des circuits alimentaires courts de proximité. En réunissant des acteurs de la recherche, de la formation et du développement, il vise à fournir à la fois des éléments de réponse et des outils aux producteurs et aux organismes qui les accompagnent, aux collectivités, aux associations..., sans oublier les lycées agricoles.
*Auteurs de l’enquête : G. Akermann (INRAE), A-C. Brit (FR CIVAM Bretagne), Y. Chiffoleau (INRAE), C. Darrot (Institut Agro), Y. Deroche (INRAE), D. Guennoc (Terralim), G. Maréchal (FR CIVAM Bretagne), L. Petitzon (APCA), A. Ugaglia (Bordeaux Sciences Agro), F. Wallet (INRAE).
Photo ©Getty - Crédits : Dougal Waters
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