Damien Deville est géographe et anthropologue de la nature. Il travaille notamment sur les jardins en ville dans des territoires connaissant des difficultés sociales et économiques. Il défend une agriculture urbaine qui soit réellement en lien avec le vivant pour tendre vers "des territoires réellement inclusifs de la diversité humaine comme non humaine".
Qu’est-ce que signifie l’engouement actuel pour l’agriculture dans et autour des villes ?
Densité urbaine, stress en ville, pollution de l’air, érosion de la biodiversité, volonté de se rapprocher de la nature ou encore cadre d’expression militant de lutte contre le tout privé dans les espaces urbains, les raisons qui amènent les citadins à renouer avec l’agriculture sont extrêmement nombreuses. D’ailleurs les expériences d’agriculture urbaine prennent des formes diversifiées en fonction des enjeux géographiques dans lesquels elles s’intègrent et des idéologies qui animent les porteurs de projets. Si bien que certains projets d’agriculture urbaine semblent prendre des directions sociales ou économiques qui s’opposent davantage qu’elles ne se complètent. Dans la relation aux vivants, dans la manière de construire le lien à l’autre et de s’approprier les espaces, les jardins partagés par exemple offrent un cadre d’expérience d’une ville fabriquée pour et par les citadins. Ils sont également des lieux d’éducation pour se rapprocher de la nature, des oasis de biodiversité, des espaces de partage, de citoyenneté, des remparts contre l’ilot de chaleur urbain. A contrario, des fermes dites "verticales", sans sol sans soleil, prennent des formes entrepreneuriales extrêmement classiques, et renouent avec l’idéologie dominante du développement : des villes néolibérales qui maximisent leurs capacités d’attractivité et de compétitivité.