Capture-dcran-2021-05-30--09.57.50

Voulu par le président de la République et organisé par le ministère de l’Agriculture et celui de la Transition écologique, le "Varenne agricole de l’eau et de l’adaptation au changement climatique" vise à intégrer la problématique du changement climatique dans le projet agricole français. La conférence de lancement s'est tenue le 28 mai 2021. Retour sur les points forts.

Les travaux doivent intégrer "les enjeux de souveraineté alimentaire, de sécurité sanitaire et de santé publique, de création de valeur ajoutée et d’emplois, de maillage des espaces ruraux, de renouvellement des exploitations et de protection de l’environnement. Ils doivent s'inscrire dans le cadre du droit européen et dans sa déclinaison nationale fixée par le code de l’environnement. Ainsi, ils suivront les objectifs de la directive cadre sur l’eau et sa mise en oeuvre opérationnelle par bassin. Enfin, le Varenne s'appuyera sur une vision partagée de l’eau comme élément de patrimoine à protéger et à valoriser et comme ressource nécessaire aux cultures et aux cheptels. ( voir contexte)

Identifier des solutions de gestion pérenne des ressources

Le Varenne a pour objectif, sur la base des recommandations élaborées lors des Assises de l’eau*, de poursuivre les travaux en cours afin d’aboutir à une stratégie d’anticipation au changement climatique.
Des chantiers sont déjà bien engagés. C'est notamment le cas de la mise en place des « Projets de Territoire pour la Gestion de l‘Eau » (PTGE) au sein d’un cadre de concertation et de dialogue pour une approche multi-usage. C'est aussi un décret relatif à la gestion quantitative de la ressource en eau et à la gestion des situations de crise liées à la sécheresse qui sera pris très prochainement. D'autre part, dans le cadre des financements du volet agricole du Plan France Relance, une enveloppe de 200 M€ est consacrée aux investissements de protection contre les aléas climatiques et 30 M€ ont d’ores et déjà été consacrés à de l’investissement pour moderniser, améliorer et créer des ouvrages hydrauliques.
Enfin, la protection de la ressource en eau, tout comme son utilisation dans le respect des équilibres naturels et d’une gestion durable, relèvent de l’intérêt général. Le Varenne a aussi l’ambition de réunir l’ensemble des parties prenantes pour aborder et dépasser les points de divergence.

Cet exercice doit permettre de bâtir des solutions concrètes sur la question des usages de l’eau en agriculture.

Trois thématiques de travail

Les trois thématiques retenues visent à déterminer les contours d’une stratégie d’anticipation et d’adaptation du secteur agricole au changement climatique. Elles sont portées par des personnalités mandatées par les ministres et appuyées par l'INRAE (Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement) et les instituts techniques.

*Le thème n°1 "Se doter d’outils d’anticipation et de protection de l’agriculture dans le cadre de la politique globale de gestion des aléas climatiques" a pour objectif d'améliorer les dispositifs de gestion de crise pour mieux anticiper et gérer les évènements de sécheresse. Présidée par Frédéric Descrozaille, député de la 1ère circonscription du Val-de-Marne, et rapportée par Hervé Lejeune, membre du CGAAER (Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux), trois axes de travail seront développés au sein de cette thématique : La révision du dispositif d’assurance récolte pour 2023, l’évolution de la gouvernance du Fonds national de gestion des risques en agriculture (FNGRA) dès 2021 et le protocole de gestion agricole des crises de sécheresse.

*Le thème n°2 "Renforcer la résilience de l’agriculture dans une approche globale en agissant notamment sur les sols, les variétés, les pratiques culturales et d’élevage, les infrastructures agroécologiques et l’efficience de l’eau d’irrigation" a pour objectif d'aboutir à des stratégies d’adaptation au changement climatique. Présidée par Anne-Claire Vial, présidente de l'ACTA – les instituts techniques agricoles et rapportée par François Champanhet, membre du CGAAER, cette thématique sera travaillée de trois façons : Travaux par les filières pour l’adaptation au changement climatique, diagnostics territoriaux à l’échelle régionale et des réflexions thématiques avec l’ensemble des parties prenantes viendront ancrer ces sujets-clés (Quels leviers pour une irrigation efficiente compatible avec le bon état des eaux et les autres usages ? Quelle contribution de la sélection génétique pour l’adaptation de l’agriculture au changement climatique ? Quelle agriculture de résilience pour les quinze prochaines années ?). Le tout sera coordonné par l'ACTA – les instituts techniques agricoles avec l'appui scientifique de la cellule « Recherche Innovation Transfert » (INRAE/ACTA/APCA).

*Le thème n°3 "Partager une vision raisonnée des besoins et de l’accès aux ressources en eau mobilisables pour l’agriculture sur le long terme" a pour objectif d'identifier les orientations et actions à mettre en place pour une mobilisation sécurisée des ressources en eau à long terme et construire une vision partagée pour mobiliser au mieux ces ressources. Présidée par Jean Launay, président du CNE (Comité national de l’eau) et rapportée par Luc Servant, APCA (Assemblée permanente des chambres d’agriculture), cette thématique sera alimentée par trois groupes de travail qui travailleront sur les questions suivantes : Quelles voies de sécurisation des projets territoriaux de gestion des ressources en eau ? Quelle stratégie d’accès à l’eau pour l’agriculture par une meilleure mobilisation des gisements existants ? Quelle politique d’aménagement pour répondre aux besoins de ressources en eau à l’horizon 2050 ?

Un calendrier en trois étapes

Cette conférence de lancement a permis de lancer les trois groupes de travail qui, de juin à décembre 2021, vont étudier ces sujets. Les travaux associeront dans leurs différentes étapes, les deux ministères, ainsi que les parties prenantes et opérateurs concernés par les sujets traités (organisations professionnelles agricoles, collectivités en charge de l’assainissement, de l’eau potable ou de l’aménagement du territoire, associations de protection de l’environnement, associations de consommateurs, membres des comités de bassin concernés par les sujets agricoles, fédération nationale de pêche, Agences de l’eau, Office français de la biodiversité).  Enfin, en janvier 2022 se déroulera la synthèse du Varenne mais les conclusions des trois groupes de travail seront échelonnées dans le temps : À court terme pour le thème n°1, d’ici la fin de l’année pour le thème n°2 et début 2022 pour le thème n°3.

Comment participer ?

Les travaux du Varenne sont ouverts à l’ensemble des parties-prenantes (agriculteurs, ONG, élus…), sur demande. Une adresse mail dédiée sera communiquée ultérieurement. Toutes les parties prenantes volontaires pourront être associés. Les groupes de travail seront constitués par les présidents de groupes en veillant à garantir la diversité des points de vue. 

Le projet Explore 2070 qui s’est déroulé de juin 2010 à octobre 2012, a eu pour objectif d’évaluer les impacts du changement climatique sur les milieux aquatiques et la ressource en eau à l’échéance 2070, pour anticiper les principaux défis à relever et hiérarchiser les risques ; et d’élaborer et d’évaluer des stratégies d’adaptation dans le domaine de l’eau en déterminant les mesures d’adaptation les plus appropriées tout en minimisant les risques. Porté par la Direction de l’Eau et de la Biodiversité du ministère en charge de l’écologie, il a rassemblé une centaine d’experts venant d’établissements de recherche et de bureaux d’études spécialisés. 

Les Assises de l'eau. Lancées en avril 2018 par le ministère de la Transition écologique, les Assises de l’eau ont d’ores et déjà défini une série d’actions à conduire les prochaines années concernant directement le secteur agricole, à savoir :
- mettre en place une gestion collective et des règles de partage de l’eau, avec un objectif : réduire les prélèvements d’eau liés à tous les usages (domestiques, industriels et agricoles) de 10 % d’ici 2025 et de 25 % d’ici 2035 ;
- élaborer a minima 50 Projets de Territoire pour la Gestion de l‘Eau (PTGE) d’ici 2022 et 100 d’ici 2027 ;
- recenser les stockages d’eau et réallouer les volumes stockés non utilisés ;
- accompagner les agriculteurs vers un usage sobre en eau et dans la réussite des PTGE ;
- tripler le volume d’eaux réutilisées d’ici 2025.

Le contexte L'agriculture est concernée en tout premier lieu par le changement climatique. Les scénarios climatiques montrent qu’à terme, la diminution du débit moyen annuel des cours d’eau sera de l’ordre de 10 % à 40 % pour une majorité de bassins en France (Conclusions du Projet "Explore 2070"*). Dans le même temps, l’augmentation probable des précipitations hivernales pourrait entraîner des excès d’eau produisant des stress tout aussi pénalisants pour les cultures. Pour les agriculteurs, les épisodes de plus en plus longs et répétés de sécheresse impacteront la viabilité de leurs exploitations.
L’eau est au coeur de ces problématiques : les prévisions d’impacts du changement climatique indiquent qu’en France, l’agriculture des régions les plus méridionales deviendra pratiquement impossible sans transformation profonde dans la gestion de l’eau d’ici la fin du siècle.
L’agriculture des régions tempérées du Sud devra s’adapter à une « méditerranéisation » des conditions climatiques, voire à une aridification des zones les moins fertiles. Plus au Nord, la disponibilité de l’eau pourra être également affectée, mais la dépendance à l’irrigation est moindre. Il est donc nécessaire d’engager un plan d’action permettant à la fois une bonne gestion des ressources et une meilleure adaptation des exploitations  agricoles au changement climatique.