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Curiosity is Keys, le département de recherche et développement de Keys REIM* s'intéresse à l'agriculture urbaine. Il a établi "une revue de littérature" et commandé un état des lieux à une spécialiste de ces sujets pour confirmer que l'engagement dans cette voie était intéressant, à plusieurs niveaux. Echanges avec Claire Flurin, sa directrice.  

Les Français sont de plus en plus nombreux à vivre dans une zone urbaine : plus de neuf Français sur dix en 2020, selon l’Insee. Les scientifiques comme les acteurs de la ville cherchent des solutions pérennes afin de garantir une alimentation plus saine et locale aux futurs citadins. L’agriculture urbaine apparaît comme une évidence, d’après l'étude de Keys REIM, 
286 milliards de dollars, dont 7 en France : voici ce que devrait peser en 2026 l’agriculture urbaine, souligne l'étude, en reprenant les chiffres d'Allenvi publiés en 2020 et que nous avions déjà fait écho dans agri-city.info. Avec le soutien de Véronique Saint-Ges, Responsable de l’équipe de recherche « Agricultures Urbaines » de l’INRAE, l'entreprise a voulu tirer au clair la situation du secteur
“L’agriculture urbaine crée de l’impact positif dans les villes, sur les plans environnementaux et sociaux. Son intégration dans des projets immobiliers reste soumise à diverses questions, tant techniques qu’économiques, qui doivent être adressées le plus en amont possible du projet“, reconnaît Claire Flurin.

Un secteur multi-formes…

L’étude s'intéresse aux levées de fonds. "En France, Agricool a levé 25 millions d’euros en 2018 et Jungle 42 millions d’euros en 2021. Aux Etats-Unis, SoftBank, Jeff Bezos et Eric Schmidt ont injecté 200 millions de dollars dans Plenty en 2017. Les Maires des grandes villes encouragent l’agriculture urbaine. En France seulement, Paris a lancé l’appel à projets ParisCulteurs dès 2016, Lyon a mis en place fin 2021 un plan « Ville comestible » chiffré à 1,2 million d’euros pour créer 25 hectares de jardins citoyens, tandis que Bordeaux devrait bientôt suivre son exemple.Pourtant, cet attrait ne vient pas des besoins alimentaires des villes, puisque l’agriculture urbaine ne peut être que d’appoint : si Paris convertissait l’ensemble de ses espaces éligibles, l’agriculture urbaine ne pourrait couvrir que 3 à 5 % des besoins. Les retombées sont en réalité à chercher à de nombreux autres niveaux : aménagement urbain, environnement, économie, éducation, sécurité alimentaire, santé, lien social, loisirs…

Quel modèle économique ?

L'étude rapelle que "le secteur se compose en premier lieu de jardins associatifs cultivés par des particuliers et gérés par des associations loi 1901, qui n’ont pas le droit de vendre le produit de leur labeur, mais qui représentent, rien que pour l’Île-de-France, peu ou prou la même surface que l’agriculture traditionnelle professionnelle.Pour les entreprises, l’agriculture urbaine représente un investissement important pour des surfaces cultivées relativement faibles, souvent comprises entre 500 à 1500 m². Cette situation invite les fermes à imaginer des sources de revenus alternatifs à la production marchande de denrées alimentaires : outre la possibilité d’obtenir des aides de la collectivité, de nombreux services sont développés, allant de la visite du public à l’éco-pâturage, en passant par la privatisation d’espaces, l’événementiel et les activités de bien-être".

Les productions à forte valeur ajoutée telles que les herbes aromatiques ou les fleurs comestibles
permettent également de booster la rentabilité des exploitations

Quelles bonnes pratiques ?

“Dans le cadre du développement d’un projet immobilier neuf, ou d’une réhabilitation lourde, il convient d’intégrer l'agriculture urbaine le plus en amont possible pour optimiser la conception du bâtiment“, prévient Claire Flurin. “Un projet d’agriculture urbaine ne peut se lancer sans analyse précise du bâtiment, de son environnement et du modèle d’agriculture urbaine développé”. Une installation d’agriculture urbaine bénéficie notamment de l’adhésion et implication des occupants présents ou futurs. Elle requiert aussi une surface assez grande pour rentabiliser et pérenniser la culture sélectionnée, et une portance suffisante de la structure du bâtiment (l’aquaponie dépasse rapidement 1 500 kg / m² par exemple).
Les coûts d’installation, les coûts d’exploitation et les revenus peuvent énormément varier d’un projet à l’autre, en fonction des choix technologiques, des caractéristiques du bâtiment, du business model, des subventions, etc. Chaque projet doit être étudié à l’aune de ses propres caractéristiques.
A titre d’exemple, reprend l'étude, "Dans le 18e arrondissement de Paris, Weshgrow exploite 600 m² de cultures souterraines (dont 200 m² de stockage et bureaux). La ferme produit en hydroponie endives, champignons, radis, brocolis, poireaux et micro-pousses (coriandre, basilic, ciboulette, persil - des productions à forte valeur ajoutée qui permettent de trouver une meilleure rentabilité). Il a fallu que la startup débourse environ 75 000 euros pour aménager et équiper la ferme, qui compte 6 employés à temps plein. Son chiffre d’affaires varie entre 300 000 et 700 000 euros par an".

Un allié de poids

“Capable de s'intégrer dans un parc immobilier bâti ou à bâtir, l'agriculture urbaine est un allié considérable dans la création d'une ville plus durable et plus agréable à vivre. Et ce malgré son modèle d'affaire encore un peu fragile”, conclut Claire Flurin. Le marché de l’agriculture urbaine attend un développement encore plus important dans les années à venir. Il serait équivalent à 286 Mds$ d’ici 2026, selon Keys (...) De quoi allécher les proffessions de l'immbilier, entre autres!

Claire Nioncel