En 2019, le premier rapport* sur l'état de la biodiversité pour l’alimentation et l’agriculture dans le monde rédigé par les Nations Unies dressait un constat accablant. Quatre ans après, force est de constater que si les pratiques respectueuses se multiplient, les cadres favorisant sa conservation restent eux insuffisants.
Si la biodiversité constitue l’ensemble de la diversité du vivant aux différentes échelles (génétique, spécifique et écosystémique), la biodiversité pour l’alimentation et l’agriculture est l’ensemble de cette diversité qui contribue à la production alimentaire et ce qui y est associé : il s’agit des animaux élevés, des plantes cultivés, des forêts exploités ou encore des espèces pêchées. Sont également inclues les espèces sauvages prélevées ou apparentées aux espèces domestiques, ainsi que les pollinisateurs, micro-organismes du sol, et autres, regroupés sous le terme de biodiversité associée. Le rapport développe cinq constats, en apportant pour chacun un éclairage sur les décisions qui doivent être prises.
Elle fournit un grand nombre de services écosystémiques et des moyens d’existences notamment aux producteurs, ainsi moins tributaires d’intrants externes. Mais, le changement climatique, l’évolution des marchés internationaux ou encore la croissance démographique induisent un ensemble d’éléments qui ont un impact négatif sur la biodiversité : changement d’utilisation des terres, prolifération d’espèces envahissantes, mais également intensification de l’agriculture qui s’accompagne d’une utilisation excessive d’intrants et d’une surexploitation des ressources. L’interaction entre ces facteurs accentue les effets de chacun. Le bilan est sans appel : la biodiversité pour l’alimentation et l’agriculture est en déclin et les menaces qui pèsent sur elle s’aggravent. Les informations provenant des 91 pays qui ont contribué au rapport révèlent que les espèces alimentaires sauvages et de nombreuses espèces contribuant aux services écosystémiques essentiels à l'alimentation et à l'agriculture, notamment les pollinisateurs, les organismes du sol et les ennemis naturels des parasites, disparaissent rapidement.
La biodiversité associée n’est pas épargnée : partout dans le monde la superficie des écosystèmes clés fournissant des services essentiels ne cesse de reculer. Plus de 60 % des zones humides ont notamment été perdues depuis 1990, alors qu’elles jouent un rôle essentiel de tampon face aux évènements climatiques extrêmes que sont les sécheresses et les inondations.
Face à cela, les pratiques en faveur de la biodiversité se multiplient (agroforesterie, diversification des cultures, gestion durable des sols...), mais elles restent néanmoins difficiles à quantifier en raison du manque de données et de méthodes d’évaluation mais également car leurs sont généralement visibles qu’à long terme. De ce fait, les cadres juridiques, politiques et institutionnels mis en place pour favoriser l’utilisation durable et la conservation de la biodiversité demeurent insuffisants.
La divergence des intérêts, le manque de sensibilisation et de ressources des décideurs et des parties prenantes constituent un véritable obstacle à leur mise en place. Face à ce constat, la Commission préconisait en 2019, la production, la vulgarisation des connaissances sur la biodiversité et ce qui la menace, le développement et la promotion de pratiques de gestion et de préservation, l’amélioration des méthodes d’évaluation, l’implication et la sensibilisation des parties prenantes et la mobilisation de moyens conséquents. Force est de constater qu'il n'y a pas eu à l'échelle mondiale de décisions fortes pour mener à bien cette lutte pour la préservation d’une ressource sur laquelle repose l’intégralité de notre système alimentaire.
Eléa Fournier
* "Etat de la biodiversité pour l’alimentation et l’agriculture dans le monde" rédigé par la Commission des ressources génétiques pour l’alimentation et l’agriculture de la l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO).
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