Sur l’île de Nantes, de grandes verrières visibles de loin se construisent sur les toits de hauts immeubles. Ce sont les serres d’une ferme urbaine associée au projet des 5Ponts, programme immobilier solidaire qui verra le jour courant 2021. Ce projet a été initié par l’association Les Eaux Vives qui lutte contre l’exclusion sociale. Une ferme urbaine transitoire est aujourd’hui en activité sur le site provisoire de L’Agronaute. Découverte et retour sur le projet.
L’inclusion sociale est le pari de ce projet hors norme. Le projet 5ponts accueillera les activités de l’association Les Eaux Vives qui lutte pour venir en aide au plus démunis. Elle a notamment mis en place une halte de nuit, une de jour et un restaurant social. Afin de favoriser une mixité sociale, le projet accueillera également des logements sociaux, des logements libres, une boutique Emmaüs, un restaurant de quartier, des bureaux d’entreprises et surtout une ferme urbaine. Cette dernière, productive, récréative et pédagogique, apportera un caractère innovant au quartier. C’est l’agence nantaise d’architecture Tetrarc, sensible au végétal et à l’alimentation dans la ville, qui a imaginé la proposition.
Un projet de ferme urbaine pour un large public
Le projet de ferme urbaine a nécessité un travail d’ingénierie important et précis. Urbaniste et consultant en agriculture urbaine, également membre du comité d’experts d’Agri-city.info, Julien Blouin a été retenu pour accompagner ce projet.
Au sein d’un groupe de travail associant Olivier Durand, maraîcher à la Sorinières sur l’île de Nantes, ils ont mené un diagnostic pour proposer une modélisation technique, économique et juridique de cette future ferme urbaine.
"Si vous isolez toute la production sur la toiture, la dynamique de quartier qu’on souhaite impulser ne sera pas atteint, il a besoin d’une visibilité au sol, notamment pour amorcer la mixité fonctionnelle du quartier. Ce qui est produit en haut doit être rappelé en bas…et partagé", explique Julien Blouin.
Le projet de ferme urbaine a fait l’objet d’un appel à manifestation d’intérêt (AMI). C'est la proposition de l’association d’agriculture urbaine La SAUGE qui a été retenue. Leur projet inclut des activités de production mais aussi pédagogiques, récréatives, événementielles et également d’inclusion sociale par le travail.
L'objectif du porteur de projet, Antoine Devins, ingénieur agronome spécialisé en agriculture urbaine est de favoriser la pratique d’une activité agricole pour le plus grand nombre. Antoine a déjà de l'expérience car il est également le créateur de la ferme urbaine La Prairie du Canal (2015) à Paris qui propose déjà des ateliers pour des publics sensibles et fragiles.
Une ferme urbaine transitoire déjà en place : l’Agronaute
La SAUGE a déjà mis en place sur l’île de Nantes cette ferme urbaine provisoirement nommée l’Agronaute en attendant que l’espace du projet des 5Ponts soit disponible. Il s'agit d'’urbanisme transitoire. La ferme est située sur l’ancienne place du Marché d’Intérêt National (MIN) dans l’ancienne halle aux fleurs d’une surface de 3500 m2 pour une durée de cinq ans. L’Agronaute a démarré son activité au printemps 2019. L'espace provisoire permet d’expérimenter et d’améliorer le modèle économique et les techniques de production. L’Agronaute développe une production de jeunes pousses pour une quinzaine de restaurants et une dizaine de distributeurs.
La SAUGE* s’installera dans les serres de 700 m² des 5Ponts en 2021 et sur un terrain de 3 000 m² au sol en 2023-2024. Les serres sont actuellement en construction par l’entreprise CMF spécialisée dans les bâtiments en verre. Orientée vers l’agriculture urbaine depuis cinq ans, elle est aujourd’hui référente dans ce domaine grâce à l’acquisition d’un savoir-faire complexe. Les serres des 5Ponts sont entièrement vitrées avec du verre sécurisé.
"Un verre qui ne peut pas blesser en se brisant" rappelle Gilles Voydie, de l’entreprise CMF. 50 % de leurs toitures pourront s’ouvrir et des toiles en aluminium couperont horizontalement les serres pour créer de l’ombrage et réguler la température. "Elles laisseront passer assez de lumière tout en rejetant la chaleur vers l’extérieur en été, et en la renvoyant vers l’intérieur de la serre en hiver" précise Gilles Voydie. L’ouverture des aérations et l’inclinaison des ombrages seront pilotées par un ordinateur de gestion climatique renseigné par une station météo à l’intérieur de la serre. Cette station pourra enregistrer la vitesse du vent, mesurer la température ainsi que l’intensité et la course du soleil.
Une réinsertion sociale à chaque étape
Le projet d’inclusion sociale a déjà démarré pendant le chantier, la Samoa** ayant imposé une clause d’insertion. L’entreprise CMF a ainsi employé des personnes exclues professionnellement pour travailler 150 heures sur le chantier des serres des 5Ponts.
Le projet a pour objectif de mélanger des publics différents et de réunir des activités diverses, incluant la réinsertion sociale. Celle-ci est présente à toutes les étapes du projet, de sa conception jusqu’à sa construction, en passant par le projet de la ferme urbaine.
Le projet subventionné par la ville de Nantes, et par Nantes Métropole a pris de l'ampleur, au fil du temps et avec l’appui de nombreux partenaires.
Il s'agit d'un projet urbain intégré, reconnu comme particulièrement innovant en Europe