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L'entreprise de solaire photovoltaïque dans le Var, Soleil du Sud, a crée un jardin potager pour alimenter ses salariés en fruits et légumes bio tout au long de l’année et a embauché un maraîcher pour s’en occuper. Article de Hervé Vaudoit paru dans Marcelle Média.

C’est l’un des rares bienfaits de la crise sanitaire que nous traversons. Avec l’épidémie de Covid qui sévit depuis dix mois, de très nombreux Français ont redécouvert les vertus de la consommation de proximité et le rôle primordial que jouent les producteurs locaux dans l’approvisionnement quotidien d’une population confinée à domicile. Certains n’ont toutefois pas attendu ce douloureux épisode pour s’en convaincre. Comme Joël Oros, un ingénieur en génie civil à l’origine d’une des plus belles réussites entrepreneuriales de ces dernières années dans la région.

Un patron attentif à ses salariés et à l’environnement

Soleil du sud, l’entreprise qu’il a créée en 2009, après 20 ans de carrière chez Vinci Energie, est en effet devenue leader de la production électrique photovoltaïque dans le Var, avec 103 centrales solaires construites en 11 ans, 115 000 m² de panneaux installés en toiture et 17 MWc de puissance cumulée. Mais pour industrielle qu’elle soit, sa logique d’entrepreneur l’a toujours conduit à prendre soin de ses collaborateurs et de son environnement, au sens large du terme.

Pour lui, la responsabilité sociale des entreprises – la fameuse RSE – n’a jamais été un alibi commode. À l’image de la prose chez Monsieur Jourdain, il y a ceux qui en font sans le savoir et ceux qui en parlent sans en faire. Joël Oros appartient clairement à la première catégorie. Son engagement se traduit d’ailleurs en faits plutôt qu’en mots. Par exemple, tous les panneaux que Soleil du Sud pose sur les toits de Provence sont fabriqués en Europe et tous ses salariés sont en CDI depuis leur premier jour dans l’entreprise. Aussi, quand une vieille amie, Laurence Berlemont, est venue le voir début 2019 avec une nouvelle idée très « RSE », il lui a évidemment prêté une oreille attentive.

Un cercle vertueux, vert et bio

« Le concept qu’elle avait imaginé, raconte-t-il, c’était de salarier un maraîcher qui aurait pour mission de produire de la nourriture bio pour une collectivité, que ce soit une entreprise, un service public, un club de sport ou une maison de retraite. Que cela pourrait créer un cercle vertueux et remettre au goût du jour les vieilles valeurs qui ont de nouveau le vent en poupe comme le local, la culture sans produits chimiques, le lien social, l’effort collectif… »

L’idée l’interpelle, mais pas au point de le séduire sans réserve. « Comme beaucoup, j’avais essayé le système des Amap, avoue Joël Oros. Je m’étais même inscrit à une ruche, mais ce n’était pas pratique pour moi, avec les horaires fixes pour venir chercher son panier. Quand on est chef d’entreprise, on n’est pas maître de son emploi du temps. » Mais le patron de Soleil du Sud perçoit tout de même l’originalité de la démarche et invite Laurence à présenter son projet devant l’APM, une association d’entrepreneurs dont il est membre depuis plus de 25 ans.

Encouragée par l’accueil réservé à son projet par cet aréopage, Laurence Berlemont lance dans la foulée sa propre boîte, Potagers & Compagnie, qui propose de créer des jardins d’entreprise gérés par un maraîcher salarié. Convaincu à son tour de l’intérêt de la démarche, Joël Oros sera le premier client de la petite start-up. « L’avantage que j’avais en tant qu’entreprise, c’était d’être installé à Rocbaron, un petit village dans la campagne. Et, en tant que patron, d’avoir chez moi un très grand terrain où installer un potager. » Sauf que sa terre est trop pauvre pour y faire pousser des légumes et trop chargée en pesticides viticoles résiduels pour espérer la cultiver en bio. « On a alors décidé d’installer 600 m² de grands bacs en douglas bio, on les a remplis de terre fertile et on y a planté une large variété de fruits et légumes en suivant les principes de la permaculture », détaille Joël.

Un panier bien rempli pour 15 euros

C’était en novembre 2019. Trois mois plus tard, la production démarre, pile-poil au moment où la France se retrouve confinée à domicile. Et à partir de début juin, c’est l’explosion. « Tout au long de l’été, on a été noyés sous les tomates, les courgettes, les radis, les aubergines, les poivrons… explique Joël, encore surpris par la productivité de son potager. Aujourd’hui, poursuit-il, on a encore quelques légumes d’été, mais ce sont les choux, les blettes, les potirons et les salades qui ont pris le relais. »

Pour 15 euros par semaine, lui et ses 16 salariés ont droit à un panier bien rempli que le maraîcher de l’entreprise leur amène sur place le vendredi après-midi. Sur chaque panier est mentionnée la valeur marchande de l’ensemble, au cours moyen du kilo relevé dans les magasins bio. « Comme ça, chacun peut mesurer l’intérêt d’avoir notre propre potager », souligne le patron, qui en a évidemment calculé le coût avant de se lancer. « Cela revient à l’entreprise 1000 euros par an et par salarié, soit peu ou prou le coût des tickets restaurant sur un an », indique-t-il. Avec, en plus, la satisfaction de manger sain et local. Et de faire des économies. « Depuis le mois de juin, je n’ai plus acheté un seul fruit ou légume en magasin », avoue Joël, qui ne compte pas s’arrêter en si bon chemin. Parmi les projets qu’il prépare pour les prochains mois, l’installation d’un poulailler, histoire de compléter les paniers avec des œufs bio, et la remise en état de son oliveraie de 60 pieds, pour produire une huile certifiée Soleil du Sud. Où on sait mieux qu’ailleurs ce que « gagner sa croûte » veut dire.